Les biais cognitifs chez les développeurs

Le métier de développeur n’est pas de tout repos. Au-delà des compétences techniques, il y a énormément de problématiques et de débats autour de notre métier. Que cela soit technique, social ou financier, tout y passe. On y retrouve également au milieu un conflit générationnel entre les “nouveaux entrants”, la génération qui a presque toujours connu internet et ceux qui devaient encore se référer à un Jedi pour accéder à la connaissance ou tout simplement, le bon vieux bouquin - qui soit dit en passant est toujours une très bonne référence. Cependant, dans ce fabuleux mélange de rockstars, de passionnés, d’un marché salarial tendu (plus d'offres que de demande), sans parler du bon ou du mauvais développeur, nous avons parfois du mal à garder notre esprit critique en se laissant porter par nos biais cognitifs. Justement, parlons-en de ces fameux biais.

Distorsion de la réalité

Voilà qui résume ce que l’on appelle un biais cognitif. Ces derniers vont nous faire dévier de notre jugement pour des raisons diverses et variées pour que celui-ci ne soit pas le reflet de la réalité. Nous en utilisons chaque jour à chaque instant dans nos discours. Ils ne sont ni bons, ni mauvais, ils sont inhérents à l’être humain et nous composons avec en permanence. En réussissant à les reconnaître, nous pouvons améliorer notre perception des choses et dissocier ce qui résulte des faits ou de la foi. A ce moment-là, vous vous demandez certainement quel est le lien avec le métier de développeur ? C’est un métier complexe qui demande souvent d’avoir un esprit critique afin de baser nos réflexions sur des éléments vérifiables. Or, on constate encore beaucoup trop de biais cognitifs dans ce marché et les relations que nous avons au sein de ce secteur d’activité qui nous empêche parfois d’obtenir le bon raisonnement. Les débats entre développeurs sont animés et souvent basés sur la foi et non les faits. Alors voyons voir certaines situations que vous auriez pu rencontrer.

Ce n’est pas un jeune sans expérience qui va m’apprendre à faire du JavaScript

Vous avez 2 ou 3 ans d’expériences et vous venez de faire la relecture du code de la rockstar de la société. Malheureusement, cette personne accepte mal vos remarques car on n’a jamais osé lui dire quelque chose. Il répond alors vivement en jugeant votre expérience plutôt que de débattre avec vous de vos recommandations (bonnes ou mauvaises, le but étant bien d’en discuter). Or, par cette action, on se retrouve avec une erreur fondamentale d’attribution. Ce biais cognitif consiste à confondre les caractéristiques d’un individu et les éléments qu’il expose. On mélange le fond et la forme. Avec ce genre de réflexion, on se rend bien compte que ça ne rime à rien et qu’on apporte aucune solution. Ce sont des esprits fermés (!= de l’esprit critique) qui avancent rarement en dehors de leur foi et de leur religion (#ReligionDansLeCode). Un conseil : s’ils ne s’en rendent pas compte, fuyez. Ces gens-là sont toxiques.

PHP c’est de la merde, on est tous d’accord.

N’hésitez pas à remplacer “PHP” par ce que vous souhaitez. L’idée ici est de vous présenter le biais de projection qui consiste à attribuer à un groupe de personnes nos propres valeurs et ressentis. Vous êtes expert dans un domaine, vous êtes dans votre zone de confort et il est inimaginable de vous remettre en question sur le choix d’une technologie, d’une compétence ou bien d’autres éléments. Pour cela, il n’y rien de plus simple : à force de fréquenter des gens qui pensent comme vous, on en vient à s’imaginer que cette pensée est la norme. Il est alors facile de tomber dans le panneau en tentant de rester dans une “communauté” d’un langage ou de se concentrer uniquement avec son équipe de développeurs. Après tout : “on est tous d’accord pour dire que PHP c’est de la merde”. Le résultat de cette phrase vous empêchera une remise en question.

Ne nous trompons pas, nous sommes tous impactés par les biais cognitifs.

Malgré ces 2 exemples qui ne sont pas forcément flatteurs pour ceux qui peuvent se reconnaître dans ces biais cognitifs, sachez que ce n’est pas une fin en soi et qu’ils sont pour la plupart le résultat d’une réaction automatique. Ce sont des raccourcis mentaux existants en raison de nos limitations cognitives. Nous sommes donc tous susceptibles d’être victimes des biais cognitifs et de porter un jugement erroné. Ce sujet mérite d’être évoqué et diffusé car c’est en prenant connaissance de nos limites que nous pouvons les dépasser.

Pour preuve, lorsque vous souhaitez mettre en place une nouvelle technologie sur un coup de tête, que vous souhaitez faire évoluer une version majeure ou tout simplement, faire avancer les choses d’un point de vue technique, vous permettez de faire baisser la barrière du biais de statu-quo. Vous retrouverez ce biais cognitif chez les personnes qui souhaitent faire obstacle à l’expérimentation et aux améliorations qui peuvent en découler. Ce biais peut conduire à prolonger des situations catastrophiques alors qu’il est peut-être tout simplement nécessaire de faire bouger les choses. Bien évidemment, cela ne veut pas dire qu’il faut changer les choses en permanence.

En d’autres termes, le but de cette histoire n’est pas de juger les uns ou les autres mais de prendre conscience que l’univers des développeurs est parsemé d'embûches. Nous sommes dans une voie royale par rapport à beaucoup d'autres et on se retrouve régulièrement confronté à beaucoup d’égo, de croyance et de fierté. En ayant conscience de ces différents éléments nous en sortirons tous meilleurs pour nous rapprocher de l’esprit critique et permettre que tout à chacun puisse s’améliorer.